(…) Le Gouverneur Merlin suivit à la lettre les conseils de l’interprète Doudou Seck afin de ne causer aucune frustration de la part de Cheikh Ahmadou Bamba durant son séjour. C’est ainsi que le colon attendit que l’heure de la prière de la mi-journée passe, avant de faire appel à Serigne Touba.
Arrivé sur les lieux, Cheikhoul Khadim commença par purifier le bureau avec de l’eau avant d’y étaler son écharpe pour y poser, par la suite, le saint Coran qu’il tenait avec ses mains bénites. Après ceci, le Cheikh effectua une prière surérogatoire.
Le gouverneur Merlin reprocha alors à Serigne Touba cet acte qu’il venait de poser dans le bureau car selon lui, les agissements du Cheikh seraient discriminatoires à leur encontre. Après avoir certifié sa bonne foi, Khadim Rassoul leur fit savoir qu’il était nécessaire de purifier le bureau au préalable vu la sainteté du livre qu’il allait y poser; concernant la prière, le Cheikh soutient que les lieux étaient si bien décorés que seule l’adoration de Dieu y était appropriée, raison pour laquelle il y a prié.
Après ces explications de part et d’autre, Merlin commença à formuler de long discours d’introduction quand soudainement Cheikh Ahmadou Bamba l’interrompt pour lui dire d’entrer dans le vif du sujet car il n’avait pas le temps.
Cette réaction du fondateur du mouridisme avait fortement intimidé le gouverneur qui est finalement allé droit au but en reconnaissant la responsabilité d’avoir constitué comme prisonnier et exilé le Cheikh en 1895 alors sur aucun fondement juridiquement, légalement ou légitimement acceptable. Devant ces explications et excuses que lui présente Merlin, Cheikhoul Khadim réitère son engagement envers le Tout-Puissant et lui répondit qu’il n’y a jamais eu de confrontation entre eux et que tout ce qui a pu se passer découlait des conséquences de son pacte avec Dieu le Seigneur Tout-Puissant.
Le gouverneur poursuit en formulant le souhait d’être tenu informé des besoins financiers du marabout afin d’y subvenir. Serigne Touba lui répondit: « Mon Seigneur m’a comblé bien avant vos naissances, et sachez qu’à part Dieu personne n’est en mesure de subvenir à mes besoins ».
Ensuite Merlin lui témoigne une reconnaissance que le Cheikh rejeta en lui disant : « sachez que vous montrez une reconnaissance à quelqu’un qui ne sera jamais reconnaissant envers vous. »
Pour finir, le gouverneur voulu remettre de l’argent à Serigne Touba qui refusa catégoriquement de le toucher avant d’inviter Serigne Mouhamadou Moustapha, qui voulait le prendre, à faire de même. Car le Seigneur avait alerté le Cheikh concernant les tenants et les aboutissants de cette rencontre bien avant qu’il ait eut lieu. Ainsi Serigne Touba était informé de la volonté des colons, qui consistait à le corrompre avec de la richesse, vu leur échec irrévocable dans leur entreprise d’intimidation par l’épreuve de force.
Cheikh Ahmadou Bamba ordonna ensuite à Serigne Massamba Mbacké de réciter le poème qu’il lui avait demandé d’apprendre 5 à 7 ans plus tôt rien que pour cette occasion. Dans ses vers, Khadimou Rassoul atteste ne jamais avoir à se tourner vers autre que Dieu et que son pacte avec le Tout Puissant est éternel et indestructible. Le Cheikh ajoute que même en ce jour où l’ennemi retournera vers lui avec de meilleures intentions, le Seigneur restera sa seul orientation.
Khadimrassoul.net
