A propos de l’embarquement le Cheikh dit : « nous prîmes nos places dans un paquebot le vendredi 1er Rabi-u au matin. Le paquebot passa la journée du vendredi et la nuit du samedi en rade. Pendant ce temps, je reçus un groupe de Mourides dirigés par Ibrahima Fall venus me faire leurs adieux, les yeux en larmes ».
C’est d’ailleurs cette situation que Serigne Touba relate à travers ces vers :
« A bord du paquebot, le Clément m’a appris
Que j’étais le serviteur du chef de Médine.
Le paquebot, plein de voyageurs,
Passa la journée du vendredi et la nuit du samedi en rade.
A bord de ce paquebot bien plein
Je reçu mon adepte alors qu’il était bien attristé,
Et je lui fis mes adieux et regagnai ma place, le cœur bien éprouvé ».
Le Cheikh y reçut également une personne venue l’informer de l’arrivée d’un nouveau gouverneur qui n’avait pas encore pris contact avec les noirs. Son serviteur lui a conseillé d’écrire à ce gouverneur pour lui prouver son innocence et demander sa libération. Sous l’insistance de cet homme, dit le Cheikh, il acceptait son conseil et pris sa plume. Mais, Serigne Touba dit qu’à peine traçait-il une ligne que le Seigneur des créatures lui parla en ces termes : « Tu oses te plaindre auprès d’une créature comme toi au lieu de Moi ? » Alors « je faillis mourir de peur et de honte puis j’effaçai la ligne » dit le Cheikh. Et il poursuit : « Quand l’homme insista de nouveau, je lui fis savoir qu’il m’était impossible de continuer. »
Toujours à propos de cet incident, Cheikh Ahmadou Bamba dit :
« L’envoyé du gouverneur m’a conseillé
D’adresser une lettre au nouveau gouverneur venu de France.
J’ai accepté d’abord le conseil, puis j’ai regretté
Et effacé ce que j’avais déjà écrit.
Au même moment l’ordre me fut donné d’écrire
Et j’écris le poème bien agréé.
Afin de mentionner le nom de celui qui montre Sa Voie
Par mon intermédiaire.
Le « poème bien agréé » dont il est question ici est celui composé sur les lettres du verset coranique « Et je confie mes affaires à Dieu, car Dieu est observateur des serviteurs » le Coran (sourate 40, verset 44) et qui commence par: « Je consacre mes écrits au service du Roi De la terre, du ciel et des rois… »
Le paquebot quitta Dakar le samedi qui suit et fit une escale à Conakry où un homme originaire du Saloum vint rencontrer le Cheikh à bord, lui offrit un précieux cadeau et lui dit: « j’ai appris que tu allais arriver à bord d’un paquebot à destination du Gabon et je suis venu te rendre visite pour que tu pries pour moi et me donnes des conseils ». C’est grâce à cet homme, dit le Cheikh, « que j’ai su pour la première fois le nom de mon lieu d’exil. J’ai prié pour lui et lui dit en guise de conseil: » Ô frère, Sache où que tu sois qu’il n’y a de Dieu que Dieu, et que quiconque s’adresse à un autre que Lui, saura qu’il n’y a d’autre Dieu que lui, et que quiconque se dirige vers Lui sous la direction d’un autre que Muhammad, saura que Muhammad est le Messager de Dieu » Puis il me fit ses adieux et partit. »
Source : Irwa-u Nadîm
Khadimrassoul.net