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Cheikh Abdoul Ahad Mbacké: Un discours et une œuvre de rigueur toujours d’actualité, par Serigne khadim Lô Gaydel

Au nom de Dieu le Clément ; le Miséricordieux  

Que le salut d’Allah soit sur Le meilleur de l’humanité ; sur sa famille et ses honorables compagnons. 

Qu’honneur demeure, en son serviteur par excellence, la pureté de la charia et personnification de la Sounnah : Cheikh Ahmadou Bamba Al Mbackiyou. 

A l’image des khalifes rashidounes de l’Islam, Qu’Allah agrée les actions ô combien importantes des khalifes de Touba à l’aune de la matérialisation de ces prières contenues dans Mathlabou fawzaini. 

En ce jour commémoratif du Magal de Serigne Abdou Ahad Mbacke, il sied de faire ce témoignage afin de rappeler le caractère magnanime de l’illustre homme qui doit faire école.

A l’image des khalifes de l’Islam qui avaient pour mission première de diriger la Ummah naissante et de la protéger ou de l’étendre de bâbord à tribord, les khalifes de Touba eurent la distincte mais fort similaire mission ; ceci étant surtout dictée par les exigences du moment. Ainsi de Cheikh Mouhamadou Moustapha à Cheikh Mohammad Al Fadel, personne ne faillit à sa sereine mission, assignée avant que prenne le flambeau celui que les mourides appelleront affectueusement « Baay Lahat. » Il demeure certain qu’en vrai combattant de l’islam, Cheikh Abdoul Ahad Mbacké n’aimait guère, dans sa simplicité, que l’on étale ses titres et valeurs acquis après de forts labeurs, d’où la difficulté de cet exercice. Mais s’il fallait épingler à la poitrine du « jambaar » une devise qui résumerait sa vie, nous mettrions : Rigueur et travail. En effet ce sont là deux mots qui lui allaient à merveille étant donné que dans sa pensée, il ne pouvait se concevoir de travail sans rigueur. Ainsi en parfait administrateur de la communauté, il comprit de bonne heure que le succès de son Khalifat ne pouvait dépendre que du fruit d’une extrême rigueur. 

Dès lors, devant l’énormité de la tâche qui l’attendait avec la ville de Touba, il se présenta comme un guide pragmatique avec la pioche à la main. Alors, s’il fallait haranguer la foule mouride avec enthousiasme, ce serait à la mesure de la mission pour qu’elle sache qu’elle était celle choisie parmi tant d’autres afin d’accomplir sur terre le contrat d’adoration de Dieu dont la grande mosquée, qui en est le substratum architectural. Ainsi, l’habitude de l’action le détournait de toute contemplation stérile. Et voilà ce qui explique qu’à l’accomplissement de chaque œuvre, il enchainait avec une autre, sans répit. Prolongement matériel de sa tâche de savant, Cheikh Abdoul Ahad trouvait de nobles et fiers accents, pour attirer l’attention du pouvoir temporel sur la quintessence du concept de développement participatif. Ceci tout en leur rappelant que l’essentiel de la vie se résumait à l’adoration du Seigneur. Alors si par moments il semblait brièvement occupait par ses actions sur la scène politico-sociale, ce n’était que pour défendre les intérêts de Touba aux fins que ces derniers soient mieux pris en compte. 

Droit de stature comme dans son caractère, ferme dans sa pensée, net dans ses paroles et tranchant dans ses décisions, Baay Lahat était de prime abord, foncièrement un talibé Mouride avant de se considérer comme un fils illustre ayant pour mission de propulser Touba sur les rails de la modernisation. Mais à l’image de son père qui ne sacrifia jamais son idéal sur l’autel de la compromission, Cheikh Abdoul Ahad fut ennemi de cette pratique, ceci tout en restant profondément humain. 

Parlant de son humanité, il me plait de rappeler que ceci fut ce qui me marqua le plus lors de notre première rencontre quand mon père Serigne Moustapha Lô m’a amené à ses pieds pour me le présenter. De là, il n’a pas arrêté pas de me prodiguer des conseils utiles quant à l’attitude de guide religieux à tenir dans l’avenir. Au demeurant, selon son enseignement, pour réussir dans la vie, la persévérance dans l’effort devait servir de bandoulière à tout aspirant. C’est ainsi que, lorsque je lui amenai, pour la première fois, quelques paquets de sucre pendant le ramadan en guise de « sukeur koor », il fut fort heureux de cette action et me demanda de persévérer dans cette voie car n’ayant aucun doute que de cette manière, un jour, ces quelques kilos de sucre acheminés de Thiès, se transformeront en camions puis en dizaine de millions pour tout khalife de mon époque. L’histoire lui donna certainement raison ! 

Aussi durant tout le temps que nous le fréquentions, nous n’apercevions à aucun moment une quelconque fatigue car la mission envers Touba était bien plus importante pour sentir quoique cela soit. Ainsi sa vision futuriste fut uniquement pour la ville de Touba. Et dans un souci de regroupement de la communauté, il entreprit un programme de lotissement de centaines d’hectares de terres qu’il cédait après moyennant la symbolique somme de 50 frs par terrain. Son discours associé à cet effet fut de dire que chaque mouride se devait d’avoir une maison à Touba qui serait le témoin de sa demeure au Paradis. Touba étant selon un hadith rapporté par Ibn Hibban (RA) : « un des arbres du paradis dont l’étendue correspond à une marche de cent ans. Et quand Cheikhoul khadim le découvrit après une longue recherche, il trouva ces éléments sacrés qui étaient déjà les signes d’un lieu de dévotion et les fondements de la future mosquée. Il s’agit de l’arbre de de félicité (gouye tekhee), de la dune (le mbepp ), et de l’étang (mball). Lorsqu’il fut temps de prier, Serigne Touba se purifia avec l’eau de l’étang, se jucha sur l’arbre pour appeler à la prière comme le ferait le muezzin puis entra dans le creux de l’arbre, baobab qui lui servit de lieu de prière. Subséquemment à cette action, la mosquée, par-delà la ville de Touba était née. Serigne Abdoul Ahad fit alors son sacerdoce de sortir sous terre cette ville qui allait allier la modernité à la sainteté du lieu. 

Sous son khalifat, non seulement Touba se conjugue avec l’idée d’orthodoxie mais aussi d’importantes réalisations sont accomplies. La mosquée fut transformée, une bibliothèque est créée pour rassembler tous les écrits de Serigne Touba, l’électricité de la cité et le téléphone sont mis en service de même que les forages et le réseau routier moderne. Si dans le domaine sanitaire il s’investit corps et âme pour l’édification de centres hospitaliers modernes, dans le secteur social on note la réhabilitation du marché Ocass ainsi que la création d’une chaussée de deux voies depuis l’entrée de la ville tout en offrant la sécurité nécessaire par la création d’un poste de gendarmerie. Tout ceci, pendant que l’eau bénite d’Aynou rahmati coulait maintenant à flot de sa source. Que d’actions significatives, sachant que la région de Diourbel elle-même n’occupe qu’un faible pourcentage du territoire. De plus, la ville de Touba qui n’a jamais reçu l’aide de la coopération internationale et sans aucune ressource naturelle notoire se hissera bientôt très haut, allant jusqu’à se positionner comme l’une des plus grandes du senegal. Du reste, l’exemplarité de Touba fut reconnue au sommet des villes d’Istanbul. 

Au demeurant celui qui naquit en 1914 et vécut jusqu’en 1989 se montra si généreux dans l’effort et s’est consacré sans relâche à la rénovation de la grande mosquée de Touba. À ce titre l’on se rappelle encore ce commentaire contenu dans le journal de Jeune Afrique économique qui dans sa livraison 177 à la page 92 note avec étonnement que : « Sur un simple ndiguël de Serigne Abdou Lahat l’ancien khalife général des mourides, les dons des talibés ont permis de réunir une pareille somme (trois milliards) en 1990 en l’espace de quelques jours pour rénover et agrandir la mosquée de Touba (…). »

Et si sous son khalifat des records de productivité furent battus avec l ‘agriculture, plus tard devant la sévérité de la sécheresse, ses talibés développèrent une stratégie en investissant à fond dans le secteur informel.

De toutes ses actions on note que celle-ci dénote du génie de Baay Lahat qui fut de fédérer les synergies d’action en bon administrateur général de la communauté. Il comprit très tôt que le dynamisme de la communauté mouride devait être le résultat de la rencontre de milliers de musulmans partageant la même idéologie. Cette rencontre créant une société micro cosmique globale qu’il fallait catalyser par un discours véridique et de rigueur qui rappellerait que la seule appartenance à la ville de Touba pouvait fonder l’essentiel de la relation sociale. 

Au demeurant il aimait aussi dire que la force de la confrérie résidait dans la solidarité de ses membres qui pensent de la même manière et se consacrent tous à l’essentiel. C’est à dire le travail et l’adoration. C’est ainsi que dans le message qu’il envoya lors du colloque de l’Unesco le 30 Juin 1979 sur Cheikh Ahmadou Bamba, on y vit cet extrait fort illustratif de sa pensée : « Notre maitre n’éprouvait pas d’amour ou de haine pour des considérations raciales. Ses sentiments envers les créatures de Dieu n’étaient qu’en fonction du degré auquel ces créatures se conformaient à la véritable mission de l’homme sur terre : l’adoration du Créateur Tout-puissant. »  

Travail et adoration furent le leitmotiv de sa vie car il aimait rappeler que la vie sur terre est très éphémère. En cela il me vint à l’esprit notre dernière rencontre. Je le trouvais assis à même le sol vêtu d’un habit en tissus de « maylouss » (fort simple à l’époque). Voyant mes yeux inquisiteurs, celui qui m’appelait chaleureusement Khadim Bamba m’enseigna à l’instant que tout humain devrait se familiariser avec les pépites du sable car un jour c’est cette même terre sur laquelle on marchait avec ostentation qui aura le dessus sur nous. De retour à Thiès, ces mots prononcés à quelques jours de la fin de sa mission m’accompagneront toujours en m’enseignant ainsi la simplicité. 

Témoignage de Serigne Khadim Gaydel Lô sur Serigne Abdoul Ahad Mbacké

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